Les questionnements qui émergent suite à mes rencontres avec les enseignants tournent souvent autour de la façon d’implémenter les médias sociaux dans leurs cours. En 2012, on a parfois l’impression d’être vieux jeu si on n’a pas intégré Twitter dans son syllabus.
Je réponds alors qu’avant de faire entrer une nouvelle technologie dans la classe –surtout les plateformes commerciales Facebook et Twitter– il faut auparavant les utiliser soi-même. Il faut s’être familiarisé personnellement avec les outils pour comprendre les vraies questions qui émergent à leur contact.
« Toto, I’ve a feeling we’re not in Kansas anymore »
Les médias sociaux ne sont pas une version alternative à un logiciel déjà existant. Ce n’est pas Chrome qui remplace Firefox, ni Firefox qui remplace Internet Explorer, ou Internet Explorer qui remplace Netscape. Oui ce sont des outils, mais c’est une tout autre façon d’aborder l’accès aux informations et à la connaissance (que j’appelle le filtrage social) qui a été démultiplié grâce à ces nouveaux outils. Les médias sociaux donnent un accès au contenu d’une façon aussi éloigné de nos habitudes que le World Wide Web l’a fait en nous donnant accès à du contenu hyperlié il y a 20 ans.
Si les profs ne l’utilisent pas entre eux les outils des médias sociaux, il ne faut pas espérer alors qu’ils soient en mesure de reconnaître pleinement la réelle valeur dans un cadre pédagogique.
Souvent, pour répondre à la question de savoir comment les réseaux sociaux peuvent servir la pédagogie, je propose de repousser à moyen ou long terme son implantation dans les classes. Du moins tant et aussi longtemps qu’on n’accepte pas certains points implicites des médias sociaux.
De mon point de vue, il faut accepter le fait que le prof devient un accompagnant et non un détenteur de la connaissance. Il n’est plus un garde-barrière, il est un guide.
« It’s a twister! »
Cette approche (le prof comme guide) a un nom: elle fait partie du constructivisme, une théorie de l’apprentissage. Je crois que les médias sociaux sont à leur plein potentiel dans le paradigme du constructivisme.
Les questions que je pose alors en retour sont:
- Quelle valeur y voyez-vous, pour vous-même, pour vos pairs, pour l’éducation, à utiliser les médias sociaux et à quoi ils donnent accès réellement?
- Jusqu’à quel degré le coconstructivisme s’applique dans votre matière?
- À quelle fréquence et de quelle façon le flux d’information ambiant (médias, réseaux, vie scolaire) influence (ou non) votre matière, le programme pédagogique et la vie des étudiants?
Inutile de faire entrer les réseaux sociaux dans les classes si on ne répond pas à ces questions, si on ne comprend la vraie nouveauté qu’elles apportent (et ses désagréments, notamment au niveau de l’attention). On peut le faire quand même, si vous le souhaitez vraiment. Mais vous aurez de la difficulté à enlever cette impression que ce n’est qu’une mode…