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Le TJ de 140 caractères

Le vert est passé au rouge, puis au noir. La planète a pu voir monter et retomber un élan populaire porté par les nouveaux réseaux numériques. Par manque de courage politique, l’élite n’a pas suivi. Cette fois-ci l’Iran a perdu. Mais l’opinion publique a gagné.

En 1972, McCombs et Shaw ont inventé le terme « agenda-setting » pour décrire la fonction des médias de masse qui « exercent un effet considérable sur la formation de l’opinion publique, en attirant l’attention de l’audience sur certains évènements et en en négligeant d’autres. L’agenda setting « n’est pas de dire aux gens ce qu’ils doivent penser, mais sur quoi ils doivent concentrer leur attention ».

Il existerait « une relation entre l’ordre hiérarchique des évènements présentés par les médias et la hiérarchie de signification attachée à ces mêmes problèmes de la part du public et des politiciens. » (citation : Judith Lazar « La science de la communication » , 1992)

Twitter pour diriger l’attention
Les théoriciens de la communication assumaient alors une coupe franche entre l’état de journaliste et l’état de lecteur. Le premier propose et le second dispose. Cette séparation tient-elle depuis l’arrivée de l’auto-publication (blogues, micro-blogging)? Les communications sur le web social agissent comme un percolateur de « sujets d’actualité », qui fait remonter une information à la surface.

L’écosystème de l’information se transforme avec l’arrivée du réseau: « Twitter et facebook sont les premiers niveaux d’une ‘réflexion’ qui apparaît et s’élabore là, en vrac, sur les réseaux ; puis se cristallise en s’organisant dans les blogues; puis se sédimente dans les revues papier.” (Sylvère Mercier)

Une info sans contexte
« L’info n’arrive plus ficelée comme un paquet soigné sous forme d’article avec un début (lead disent les Anglo-saxons), un milieu et une fin, ce qui implique un minimum de synthèse et d’organisation. Pauvre Aristote ». (Francis Pisani).

Ce qui est nouveau, c’est que les « premières interprétations ne sont plus le monopole des « têtes parlantes » qui pullulent sur nos écrans télé.» continue-t-il. Une information journalistique, il faut comprendre, vient généralement avec son interprétation.

Quand elle arrive via le réseau social, surtout si le lecteur y est exposé là en premier, il se trouve exposé à une interprétation non institutionnelle, ou pire, sans contexte, donc obligé de se faire une première opinion à chaud. Cette opinion, si elle se voit confortée ailleurs dans son réseau, renforce le destinataire à vouloir parfois contester celle des médias ou des organes officiels.

RT, RT, il restera toujours quelque chose
On l’a vu, depuis 1 semaine, les Iraniens ont maintenu à bout de bras (à bout de tweets) la notion que les élections ont été volés. À lire les journaux qui parlaient de président sortant comme réélu alors que la rue s’embrassait, on se demande si eux aussi ne faisaient pas dans le RT (re-tweet) aveugle…

Mais heureusement, avec Twitter, les journalistes ont pu reprendre le contact avec les événements (aidés par mille yeux et mille bras). La greffe semble prendre…

Martin Lessard
Conférencier, consultant en stratégie web et réseaux sociaux, chargé de cours. Nommé un des 8 incontournables du Montréal 2.0 (La Presse, 2010). Je tiens ce carnet depuis 2004.
http://zeroseconde.com

4 thoughts on “Le TJ de 140 caractères

  1. Reste qu’on peut s’interoger dans le cas de l’Iran sur qui sont ceux qui écrivent et si ils sont représentatif « Des Iraniens ».

  2. La manipulation de l’information est toujours d’actualité, sur Internet comme ailleurs. Pour ma part, j’aime bien voir des médias comme CNN intégrer Twitter comme source d’information et d’interaction avec les téléspectateurs. À 140 caractères, les tweets du public sont apparemment plus faciles à gérer que les appels téléphoniques.

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