«Réseauter en affaires : une habitude vieille comme le monde !» Mais réseauter en ligne est bigrement différent. Explorons.
On se rappelle tous ces pénibles moments dans les cocktails où on sentait « la vente » venir: vendre son CV, vendre ses services, vendre ses talents ou sa compagnie. Pas étonnant que plusieurs pouvaient se vanter de n’entretenir aucun réseau, synonyme d’aucune compromission.
On associe souvent le réseautage à la fâcheuse manie de distribuer ou collectionner des cartes d’affaires
Le réseautage en ligne participe d’une toute autre logique: il ne s’agit plus d’exposer « qui vous connaissez », mais bien maintenant de montrer « ce que vous connaissez » et de « participer à l’échange de connaissance ».
«Échange de connaissance»?! Quoi, mais que vend-on alors?
Avant le spécialiste disait: appelez-moi (et payez) pour savoir. La rétention de l’information était l’enjeu numéro 1. Je sais et tu ne sais pas. Paye.
Logique pas mauvaise en soi. Il faut bien vivre.
Mais par contre, dans un monde de plus en plus transparent, où le flux d’information dépasse tout ce qui a pu être imaginé auparavant, la rétention d’information constitue un suicide professionnel. Si vous ne dites pas ce que vous savez sur Internet, on ne vous trouve même pas (« no keyword, no candy »).
Participer à la circulation de l’information devient vital, partager ses connaissances (montrer ce que vous savez ou partager ce que vous apprenez) devient un enjeu de taille pour se faire remarquer dans ce monde qui se syntonise de plus en plus sur les algorithmes en ligne. Google montre la voie: pas de contenu, pas d’indexation.
Mais alors que reste-il? Si on dit tout dans un blogue, Twitter, Facebook, qui va nous engager?
Apprenez par coeur cette comptine: ( « > » veut dire est «supérieur à»)
ce que je sais sera toujours > à ce que je peux dire
ce que je peux dire sera toujours > à ce que je peux écrire
ce que je peux écrire sera toujours > à ce que l’autre peut lire
ce que l’autre peut lire sera toujours > à ce que l’autre peut retenir
ce que l’autre peut retenir sera toujours > à ce que l’autre peut direVotre valeur tient à cet avantage marginal. Tout le reste n’est que commodité.
Ce qui est partagé aujourd’hui dans les réseaux sociaux, en particulier les réseaux professionnels, ce sont principalement des sources d’information. Mais la valeur reste dans la tête des gens, et c’est le savoir tacite – ce savoir « dans notre tête » que nous avons si souvent du mal à décrire et à expliquer.
Or dans une société de surabondance d’information, le savoir qui compte le plus est le savoir tacite, un type de savoir bien différent du savoir explicite qui lui peut être décrit et diffusé à tous: le savoir tacite ne circule pas facilement. Il demande une très grande « bande passante » de contexte et un bon pouvoir d’interprétation:
Que peut bien signifier un message comme «La stratégie emarketing du #hashtag sur Twitter http://j.mp/8vNZXt»? Il manque trop de contexte pour permettre à une personne hors du domaine de saisir de quoi il en retourne.
Le réseautage en ligne demande ce type de compétence. Il demande d’être en mode partage des aprentissage tout en créant une attirance: celui qui a posté le message plus haut (en l’occurrence Jean-Luc Raymond) exprime sa compétence par le choix du lien (parmi tous les liens possibles et innimaginables) et affiche son utilité (si je m’intéresse aussi à ce lien, il peut peut-être m’aider).
Le réseautage en ligne est en fait un apprentissage continue. En partageant ses connaissances (explicites –on a vu que les connaissances implicites sont difficile à partager) on montre un saine curiosité, un respect pour son audience (dans la constance et a qualité du partage) et même une capacité d’entraide.
En fait le jeu n’est plus un push (on poussait nos compétences dans les cocktails) mais bien un pull (ceux qui ont besoin de votre aide vous retrouveront). Ils se « pré-sélectionnent » d’une certaine façon: s’il n’aiment pas ce que vous diffuser, ils ne vous appellent tout simplement pas…
C’est pour ça que LinkedIn, excellent rolodex de CV, mais très « réseautage 1.0 » (il faut « pousser » pour accéder à un réseau) a opté pour la fonctionnalité Question/Réponse: au delà de l’accès à des listes de « compétents » (à travers leur pedigree) on peut juger de leur « compétence » à travers la ou les réponses que la personne donne.
Réseautage en ligne et ses trois avantages:
– Le processus rédactionnel contribue au développement de la compréhension.
– La participation aux échanges de flux informationnels augmente la visibilité et la pertinence d’une personne dans son milieu.
– L’apprentissage en retour nourrie le savoir tacite que l’on possède.
Et c’est le savoir tacite qui a de la valeur!
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Compléments de lecture
Networking reconsidered, Harvard Business Review, John Hagel III and John Seely Brown.
(4 janvier 2010) Comparaison entre le réseautage traditionnel et en ligne
Vie privée : le point de vue des “petits cons”, InternetACTU, Jean-Marc Manach
(4 janvier 2010) Grand tour d’horizon sur le partage sociale (non-professionnel) des jeunes adolescents
Mes outils web 2.0, Rémi Thibert
(21 décembre 2009) Exemple de partage d’un enseignant: les types d’outils en ligne qu’il utilise
Social Networking: Rethinking Productivity, Steve Pavlina
(23 novembre 2009) Autre exemple de partage: sur les avantage de faire du réseautage sociale
Si j’ai bien compris ton propos, la compétence qu’on recherche aujourd’hui ce n’est pas tant le fait de savoir et de communiquer des connaissances que la capacité de les ‘lier’ (le savoir tacite?) et d’en faire ‘bon usage’.
C’est une bonne interprétation de la situation. Mais ici on parle pour une personne qui fait de la consultation et/ ou qui travaille a son compte. Il existe d’autres dynamiques sur le marché du travail où le client est plus gros que le fournisseur de service et/ ou de connaissance et qui s’attend a être rejoint et ne bougera pas le petit doigt pour vous solliciter. Je verrais mal Rogers vous twitter qu’il aimerais vous avoir pour un poste de dir. des com. pour sa branche 3G. Il va faire une annonce dans The Gazette comme d’habitude…
Mais dans le marché qui est le vôtre , c’est une très belle analyse de la situation. Comme toujours 😉
J’aime bien la comptine je vais le faire apprendre à ma petit niece….
Jean: À la « bourse » de la connaissance, on peut voir que le « savoir explicite » chute et que le « savoir tacite » monte ;-). Il y a toute une littérature sur le « savoir tacite » et en général ça se résume à: « ce que l’on n’arrive pas à rendre explicite ». Lier et faire un bon usage d’une information en fait partie.
François: les « gros » ont des employés, et ces employés peuvent recourir à des « pigistes ». Dans ce cas, on se retrouve à hauteur d’homme. Et si les règles corporatives en place demandent de passer par les ‘petites annonces’, je peux te garantir que pour des emplois qualifiés ils vérifient avant l,entrevue Linkedin Twitter, Facebook et/ou son blogue…
A propos de la comptine, dans la colonne de gauche, pourquoi les 2 dernières phrases passent-elles à la 3ème personne du singulier, alors que les 3 premières sont à la première personne ? (j’avoue que ça me trouble par rapport à l’esprit de système qui préside généralement à ce genre de texte) Ou alors j’ai rien compris 😉 ce qui n’est jamais à exclure…
Stéphane, peut-être n’es
t ce pas une « préoccupation » pour vous, car cette comptine s’adresse à ceux qui ont « peur » de se faire « voler » leur savoir.
Dans « l’ancien monde » 😉 la rétention du savoir était une source de revenus. Si je « partage » mon savoir, l’autre pouvait « s’en emparer ».
Autrement dit,et pour revenir à la comptine:
Ce que JE peux écrire sera toujours > à ce que L’AUTRE peut retenir
La morale étant que la communication de connaissances (« le partage ») n’est pas comme un échange de ballon de football: « l’intégralité » n’est pas passée comme un ballon, des « morceaux » manquent et donc le partage tel qu’il se pratique dans les réseaux sociaux n’est pas une « perte ».
Les gens qui réseautent de la « vieille façon » devraient être récomforté.. 😉